Christophe

Par Aude Haenni - 14.11.2019

Pour moi, Christophe se résume à Aline et Les Mots bleus – honte à moi, oui, vous avez le droit, fans de la première heure ! –, réminiscence d’après-midis forcée passée à écouter Radio Nostalgie en famille. Je ne me suis jamais intéressée au personnage, je n’ai pas tellement envie d’être là ce soir. Quelques professionnels de la musique m’ayant convaincue que l’artiste en valait la peine, me voici donc calfeutrée dans le fauteuil orange, à attendre, circonspecte. D’autant plus qu’à 20h45, soit 15mn après l’heure indiquée, Christophe n’a toujours pas fait son entrée sur scène.

Affublé de bottes de cow-boy, lunettes de star, cheveux longs, il fait finalement son apparition: « j’ai monté l’escalier en courant! » L’entrée annonce la couleur, chaleureuse. C’est vers un piano que le chanteur se dirige pour quelques blablas suivis des paroles anglo-francophones de Lita. Ce soir, Beausobre part en balade, nous explique-t-il. Aparté – le premier d’une longue série – afin d’expliquer le déroulé de la soirée, divisée en plusieurs périodes. Résumé ;

  1. « Couleur de nostalgie »: sous les applaudissements, voici que s’élèvent les premières notes de la Dolce Vita. Christophe enchaîne, dans une ambiance feutrée, des classiques. Ma cavalière, Succès fou… « Ici, je suis comme chez moi, je passe du bon temps! », et qu’importe les erreurs, ici et là. Comme à la maison quoi.
  2. « 2015 : Vestiges du Chaos »: pour faire découvrir et pour ceux qui aiment cet album, le chanteur quitte son piano pour ses synthés, installés au centre arrière de la scène. Rythmique, électronique, scénographie stroboscopique. Beausobre se transforme en club underground, ambiancé à 4h du mat’.
  3. « Coucou aux guitares »: celui qui nous expliquait en début de concert qu’il ne travaille ses guitares qu’en live passe ainsi côté jardin pour gratter un peu. Mais « pas de concert de blues » pour autant, « je suis venu chanter mes chansons ». Petite fille du soleil pour ne citer qu’elle. Instant musical en douceur, couplé à des informations sur son second volume de reprises, uniquement composé de duo, où Christophe s’est à nouveau bien entouré. Vivement l’écoute d’Aline par Philippe Katerine !
  4. « Période d’improvisation. Ou pas!»: il se dit décalé du format. La preuve en est lorsqu’il abandonne ses instruments, un verre de whisky à la main, pour nous raconter, à son bureau d’écolier, des histoires, son histoire. « Inventeur d’histoires pour se jouer de la vie », comme il l’explique. Ode au mensonge, à l’intime. Comme lorsqu’il nageait enfant dans les épingles de sa mère, couturière. D’où « l’audio-bio » des Marionnettes qu’il s’empresse de jouer au public, ravi de l’entracte musicale. Entracte suivie d’une narration – enjolivée ou non, on ne le saura jamais – du quotidien de ses grands-parents.
  5. « Métissage sonore improvisé »: retour au piano, entre calme, absurdité (une danse avec la chaise à son, une panne technique n’en étant pas une), instant psy, Les Paradis Perdus, La petite fille du 3ème, puis Aline, forcément. C’est encore plus proche de son public que Christophe joue ses derniers instants, en lui offrant la possibilité de choisir les ultimes titres ; réclamés par les cris, Les mots bleus, Parle lui de moi, Je l’ai pas touchée, Daisy, Bevilacqua… s’arrêtera-t-il donc un jour ? Au moment de lancer des Smooshy Mushy achetés en station-service en direction des spectateurs… Minute improbable, et de loin pas la seule ! Le rappel ne viendra pas, il nous avait averti : « Les rappels, c’est démodé ». C’est sur un générique de fin joué au synthé qu’il s’enfuit au loin.

Moi qui ne voulais pas venir ce soir… Je ne connaissais que trois-quatre chansons, qui ne m’emballent guère de surcroît. J’ai pesté sur les 15 minutes de retard. Je me suis ennuyée sur les quelques longueurs (2h40 au lieu d’1h30, il y a de quoi). J’irai pourtant écouter Vestiges du Chaos en rentrant – ou demain, car là, j’ai loupé mon train – et, j’avoue que finalement, je ne regrette pas d’avoir été là. Voir une performance d’un chanteur hors du cadre, d’une générosité inestimable, cela fait tout simplement du bien. Et cela ne peut que s’applaudir.