“Les Amis” de Brigitte Rosset et Frédéric Recrosio

Par Pauline Peytregnet - 25.11.2018

Brigitte Rosset et Frédéric Recrosio… Si vous venez de la région lémanique, ces noms devraient vous dire quelque chose. En effet, ils viennent « de par chez nous », on les croise au marché du coin et surtout, ils ont fait rire sur les planches. On les attendait avec impatience ce soir-là pour la présentation de leur nouveau spectacle : Les Amis.

Scène vide, les voilà qu’ils entrent en discutant, comme s’il n’y avait qu’eux dans la salle. On comprend dès lors qu’ils vont nous partager un peu de leur intimité. C’est eux-mêmes qui amènent et posent le décor : un tapis rouge qu’ils s’empressent de dérouler pour parader tout sourire et un simple chariot contenant une machine à café et de la nourriture prévue pour une dégustation drôlissime teintée de chantage émotionnel.

En premier lieu, les deux acolytes nous présentent le lien qui les unit et nous souhaitent la bienvenue dans leur amitié. On va partager leur complicité, leur douceur, mais aussi leurs engueulades, leurs coups de gueule, leurs tristesses. Le fil conducteur est tissé d’histoires courtes et d’autres plus longues, en liens avec leurs amis ou leur façon d’être amis. On peut se reconnaître, voir des visages, se rappeler des situations. On sourit aussi de quelques vérités sur l’amitié… « Si on n’était pas copains d’enfance, on ne serait pas copain du tout ! ».

Le texte est ficelé de façon à ce que l’on comprenne que l’un apporte à l’autre par sa différence, son enthousiasme, sa folie, sa gourmandise, ses envies. Brigitte est prête à mettre du kirsch dans son vin et du pâté dans sa bouche. Frédéric est prêt à se lâcher la grappe pour suivre Brigitte dans ses folies. On découvre aussi ce message puissant que souvent, on reproche aux autres ce que nous portons aussi en nous, quand les deux Amis qui se chantent Ramona. Une chorégraphie, me faisant penser à des jeux d’enfants, m’a rappelé cette part importante dans l’amitié : la légèreté. Les nombreux clins d’œil à nos traditions, à nos produits locaux (le kirsch pour soigner les vaches fiévreuses, le pâté de chez Mr. Chanson, la farine du Moulin de Sévery) m’ont rappelé d’où je viens.

J’ai adoré le mélange de ces deux personnalités bien marquées, ces deux tempéraments différents, reliés par un doux je-ne-sais-quoi qu’ils nous ont partagé avec amour, humour et sincérité. J’ai aussi été touchée par les histoires amères, glissées entre deux rires et touchant le cœur, ces histoires sur nos amis qui souffrent ou ont souffert.

En somme, il est toujours possible de trouver quelque chose à redire d’un nouveau spectacle, d’une telle proposition d’approche de l’amitié : trop si, pas assez cela, peut-être un peu… Tout comme on pourrait toujours trouver quelque chose à redire de quelqu’un : trop comme ça, pas suffisamment si, certainement beaucoup… Heureusement que ce texte se veut être une chronique et non une critique car je n’aurais pas envie de leur reprocher quoi que ce soit de ce soir-là. L’amitié, la vraie, ne nous invite-t-elle pas à cela ? Accepter l’autre tout entier, soit l’aimer sans condition ? Lui dire ce que l’on pense, avec les moyens que l’on a ? Pardonner et laisser l’Autre libre, tout comme Frédéric pardonnerait à Brigitte qu’elle ne vienne pas le voir s’il était à l’hôpital ? Une belle leçon de la part de ces deux amis francs, authentiques et généreux.

Pauline Peytregnet