Ou la rencontre du hip-hop de la Cie Käfig avec le virtuel d’Adrien Mondot et Claire Bardainne.
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C’est noté sur le programme, la mise en scène questionne sur la frontière entre le réel et le virtuel. Confortablement installée au deuxième rang, pour l’instant aucun doute, le premier groupe de danseurs, entièrement masculin, est bien réel. Tous tentent d’avancer, comme au ralenti, pour se diriger vers un point invisible, virtuel lui.
La musique d’Armand Amar nous emmène crescendo à l’autre bout de la scène. La chair de poule est crescendo elle aussi. Un écran s’illumine. Des milliers de pixels scintillent. Un danseur puis deux, passent derrière l’écran, balayant artistiquement des centaines de pixels scintillants. Qui est réel qui est virtuel, le doute s’installe désormais.
Le sol devient un personnage à lui tout seul, endossant le rôle d’écran ou de partenaire de danse. Il peut être statique, mouvant, parfois même intrusif.
Tantôt bulles, tantôt balles de ping pong, ou même pluie ou flocon, ces pixels se jouent parfois des danseurs, parfois les accompagnent. A la fois poétique, humoristique, acrobatique c’est un flot/flow de douceur qu’ils véhiculent.
Chaque danseur se laisse ainsi happer par le virtuel, l’enlaçant, le combattant parfois. Chacun interprète le mouvement à sa manière avec force, fluidité, charisme, pour donner au final un ensemble synchronisé et cohérent, sans besoin de règles stricts mais néanmoins maîtrisées.
Habituée des ballets classiques, cette expérience hip hop était une première. A quoi s’attendre ? Comment se laisser imprégner par des codes et mouvements que l’on ne connaît pas ? Est-ce que le virtuel ne va pas prendre la place des danseurs et les étouffer ? Autant de questions qui n’avait finalement pas lieu d’être puisqu’on peut y répondre dès les premières minutes grâce à la perfection de la mise en scène, de la chorégraphie et de son exécution. Tout est fait pour vous envoûter, et ce dès le début. L’équilibre parfait entre le réel et le virtuel vous subjugue et nous rappelle que finalement l’un ne va plus sans l’autre. Ils se complètent.
Sabine Regenass