Asaf Avidan

Par Aude Haenni - 19.10.2018

La salle est comble, impatiente. Le trentenaire tout de noir vêtu monte sur scène, seul, adresse un simple geste au public, agrippe l’une de ses guitares et démarre ce concert fort attendu en ce début de saison. Quatre, cinq titres s’enchaînent. La lumière froide éclaire le chanteur introverti assis, aux paupières régulièrement fermées.

Face à cette non-communication autant physique que verbale, je m’imagine rapidement être transportée sous un porche, au milieu du désert, à écouter l’homme sur son rocking chair, au timbre unique, changeant, grisant. Ce soir, à Beausobre, Asaf Avidan ne semble pas être venu pour l’entertainment mais bien pour nous conter des histoires. Et l’atmosphère est belle.

Il aura fallu une mélodie entraînante et des applaudissements rythmés pour que l’on aperçoive enfin un sourire franc du principal intéressé. Le chanteur se livre alors. «I was in a good mood, now I’m depressed», lance-t-il d’un ton jovial. S’ensuit une discussion sur l’archéologie de l’émotion de l’être humain, sur la colère nourrie d’espoir, sur le pourquoi de la jalousie. Retour sur quelques morceaux blues folk, frôlant une fois ou deux la démonstration, inutile. L’incursion orientale électronique bidouillée à la guitare et au looper est exécutée avec talent. L’artiste semble possédé. Voire même «crazy», comme l’aura crié une des spectatrices dans la salle. De quoi clore une première partie sur une standing-ovation de rigueur.

«Usually, when you go back home, you say you’ve seen a good concert. But I hope you’ll be depressed!» Bien loin de ce qu’ont pu nous habituer une majorité de groupes, Asaf Avidan terminera ainsi sa représentation sur des notes de peur, de tristesse, de solitude, sur un discours d’acceptation de ces sentiments.

Certes, nous mourrons tous un jour, mais ce soir, bien qu’il l’ait espéré, nous ne rentrerons pas déprimés. Loin de là. Car il ne fait aucun doute que la spontanéité, la fragilité – fortement ressentie – et cette voix si particulière auront charmé.